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Bell: l’éthique n’était pas au rendez-vous

Bell

Comme un enfant qui ne peut s’empêcher de manger du chocolat et qui nie l’avoir fait malgré son visage rempli des traces de son méfait, Bell vient de se faire prendre la main dans le sac. Sauf que Bell ne l’as pas nié. La société a avoué la faute éthique commise par plusieurs de ses employés.

Mais qu’est-ce qui lui est reproché au juste? Il appert que des employés de la compagnie auraient usé d’une tactique employée parfois par certains développeurs en rédigeant de faux commentaires positifs à propos de la plus récente version de l’application MonBell Mobile.

Le pot aux roses a été découvert par Scott Stratten, président de UnMarketing. Dans un billet fort bien documenté sur son blogue, Stratten fait la preuve hors de tout doute que plusieurs commentaires laissés sur l’App Store proviennent d’employés de Bell Canada ou de l’une de ses nombreuses divisions. Il s’est rendu compte que quelque chose ne tournait pas rond en voyant la cote de 4.5 étoiles accordée à l’application après seulement 89 commentaires. La version précédente, commentée plus de 3000 fois, bénéficiait d’une cote d’à peine 2 étoiles. Sur les 89 commentaires, plusieurs faisaient allusion à des fonctionnalités qui seront intégrées à la prochaine version de l’application, un indice probant de la connaissance intime qu’ont ces prétendus utilisateurs de l’application.

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Mais la chose ne s’arrête pas là ! Pour faire oublier la mauvaise évaluation attribuée à la version précédente de MonBell Mobile, les concepteurs ont modifié le nom de la société qui développe l’application et qui est passée de Bell Mobilité à Bell Canada. Un changement en apparence mineur, mais qui, dans certains cas, peut amener des retombés positives si la tactique est bien menée. Une tactique qui s’apparente à celle d’un fraudeur qui déclare faillite et relance son entreprise sous un faux nom, bien souvent celui d’un membre de sa famille. Il s’agit ici d’un manque de classe et d’éthique évident pour tenter de masquer la vérité.

Pour revenir aux employés fautifs, Scott Stratten a pu démontrer le lien qui les unissait aux prétendus usagers en faisant une recherche rapide parmi les fiches professionnelles sur Linkedin. Comme dirait l’autre : pas fort, chef !

Le Globe and Mail nous apprenait par la suite que Bell aurait averti ses employés de cesser ce genre d’activités. C’est une bonne chose, car selon les termes de l’entente signée entre Apple et les développeurs d’application, il s’agit bel et bien d’une pratique illégale. Le paragraphe 3.2 (f) de l’entente est on ne peut plus clair : « You will not, directly or indirectly, commit any act intended to interfere with the Apple Software or related services, the intent of this Agreement, or Apple’s business practices including, but not limited to, taking actions that may hinder the performance or intended use of […] the Program (e.g., submitting fraudulent reviews of Your own Application […]) ». Autrement dit, soumettre un commentaire frauduleux à propos de son application n’est pas permis.

Selon ce qui a été découvert, les employés de Bell auraient fait usage de cette pratique au moins sept fois. La pénalité encourue pour un tel geste demeure à la discrétion d’Apple. Les cas extrêmes peuvent entraîner la suspension du compte du développeur et le retrait de toutes ses applications sur l’App Store. Néanmoins, je ne crois pas qu’Apple aille jusque là. Le scénario le plus probable serait la suppression des commentaires frauduleux et, par conséquent, une chute du pointage moyen de l’application.

Malgré tous mes efforts, je ne peux m’empêcher de douter de la bonne foi de Bell. À mon avis, il est clair que le message envoyé aux médias pour les informer que ses employés ont été sommés de mettre fin à cette pratique tient beaucoup plus d’une tentative de sauver la face que de la volonté de faire acte de décence dans cette histoire. Étant donné la vitesse à laquelle la nouvelle s’est répandue et le flot de commentaires pas toujours très tendres qu’elle a générés, Bell n’avait sans doute pas le choix d’agir ainsi.

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N’allez pas croire que Bell est la seule entreprise à employer cette technique. Étant moi-même développeur d’applications, je pense m’y connaître un peu en la matière. Un de mes anciens employeurs, dont je tairai le nom, avait  fortement « suggéré » à son personnel de rédiger des commentaires positifs à propos de leurs applications sur l’App Store et Google Play. Personnellement, j’ai refusé de me prêter à ce jeu, mais je sais que des collègues l’on fait.

Se livrer à de telles manœuvres n’engendre rien de bon. À preuve, depuis que Bell s’est fait prendre la main dans le sac, l’évaluation moyenne de son application est passée de 4.5 à 3.5 étoiles en moins de 48 heures. Outrés, de nombreux internautes se sont permis de laisser des commentaires disgracieux et des évaluations d’une seule étoile. Une pratique tout aussi discutable, j’en conviens, mais qui montre le prix que Bell doit maintenant payer pour son geste. Un prix qui n’en valait certainement pas la chandelle.

À propos de l'auteur

Pierre Rochon

Pierre Rochon

Développeur d'applications mobiles pour iOS, propriétaire de l'entreprise Pirocso et passionné des produits Apple, je partage ma vision de l'écosystème mobile d'Apple.

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